De la Nature et du Capitalisme

Quelle émancipation pour l’humain

 

Nous entrons dans des temps privilégiés où l’ombre du péril, apparaît en filigrane des gros dégâts d’envergure planétaire, déjà accomplis ou annoncés (Pollutions diverses, changement climatique, disparition des forêts tropicales primaires, érosion de la biodiversité,…). Ces désastres compris par tous comme directement induits par le capitalisme triomphant, commencent à rendre l’opinion publique moins hostile, plus perméable, en un mot plus attentive aux thèses de ceux qui, hier encore, effrayaient le plus grand nombre. Depuis des décennies ils s’insurgent avec force contre tous les pouvoirs cautionnant les dérives de la société industrielle - marchande et annoncent dans le même mouvement que la « vraie vie est ailleurs ! ».

 

Les trois révolutions : Copernicienne, Darwinienne et Psychanalytique des derniers siècles, ont permis à l’Homme de mieux comprendre sa place dans la Nature. Paradoxalement les valeurs archaïques posées par nos ancêtres à l’aube de l’humanité, en réponse au choc entre Conscience et Rigueur des Lois Naturelles, non compréhensibles à l’époque (volcanisme, orages, entropie, souffrance, perte, mort, …), n’ont pas été ébranlées pour autant. L’Homme a déjà payé un très lourd tribu pour avoir établi par commodité ses civilisations sur des bases frelatées : croyances, illusions, obscurantismes, … Ivre de son génie, aveuglé, il continu à dénier la réalité et se prête donc d’autant mieux, même dans les domaines apparemment les plus artificiels, au « jeu » de la Nature « omnipuissante », en pensant naïvement qu’il est le maître à bord.

 

Depuis la moitié du néolithique l’humain est auto-centré sur lui-même. Plus tard, face à toutes choses, minérales ou organiques, l’occidental a auto-proclamé sa supériorité. Orgueilleux, outrecuidant et nombriliste, il a semé sa culture désastreuse partout ou c’était possible sur le globe. Les habitudes acquises au cours des siècles d’exploitation de l’Homme par l’Homme l’ont naturellement préparé de générations en générations à effectuer le fameux saut évolutif de la première moitié du XXième siècle : avènement de la société marchande dans laquelle nous sommes maintenant englués et qui engendre des dégâts à tous les niveaux. Ce système fallacieux génère les richesses en exploitant notre part sombre. Dans ce nouveau rapport à la marchandise ou la notion de besoin est contournée, les mécanismes inconscients : désirs, fantasmes, …, formant à l’endroit de l’humain, les « ressorts intimes du vivant », sont mis à contribution pour transformer l’individu en consommateur insatiable et citoyen docile.

 

La boucle dont la séquence de base : désir – plaisir – plénitude – manque – re-désir etc… perçue comme le phénomène central de l’humain est une version évoluée du mécanisme fondamental du vivant se déclinant d’espèces en espèces depuis des centaines de millions d’années. Ce n’est probablement pas un hasard si la société de marché, actuellement dominante à l’échelle terrestre exploite chez l’humain le « moteur » essentiel et solide de tout processus biologique faisant que la vie ne s’est jamais éteinte sur la planète en 3.5 milliards d’années d’évolution. Serait-ce cette perception qui fait dire à Alain Minc une formule apparemment iconoclaste : « Le capitalisme ne peut s’effondrer, c’est l’état naturel de la société. La démocratie n’est pas l’état naturel de la société, le marché oui » ?

 

Ainsi, nous entrons dans des temps privilégiés où des analyses audacieuses du phénomène humain, pur produit d’une Nature sans état d’âme, peuvent se faire jour en vue de proposer des nouvelles voies pour notre futur. Les dégâts écologiques macroscopiques et les désastres affectant l’Homme, conséquences du système marchand dominant, constituent un problème qui ne peut être pensé seulement avec les moyens intellectuels classiques. Pour aborder notre avenir, une nouvelle lecture de l’Homme doit être accomplie. Une autre dimension de l’écologie, plus fine, plus délicate est aujourd’hui indispensable : elle implique en particulier la prise en considération du fonctionnement mental de l’Homme, dans ses rapports à la Nature, depuis l’avènement de la conscience.